Aux Eurockéennes de Belfort, ça faisait 12 ans que je n’avais pas vu The Cure sur scène, cette fois-ci, ça faisait 12 jours.
Ce jeudi donc, nouvelle dose de The Cure, à Bilbao, au festival BBK Live sur les hauteurs de Kobetamendi qui dominent la ville. C’était trop tentant : géographiquement pas très éloigné de chez moi (cinq heures de route, largement faisable) et la perspective d’un concert de trois heures (et certainement au sec^^).
Et ce fut de nouveau un concert mémorable !
Comme à Belfort le show à commencé avec presque une heure de retard. Les conditions météo n’y étaient pour rien, le problème est venu d’un gros souci technique avec un des synthés de Roger O’Donnell.
Ca fait une demi-heure que les techniciens et O’Donnell lui-même s’affairent autour du synthé récalcitrant, quand Robert Smith arrive au micro pour annoncer dans un spanglish expérimental avec gestes à l’appui: « Buenas noches ! Un problema… technical… with the… clavi…caro (?)… so, dos minutos.”
Traduction libre: « Bonne nuit, on a une problème technique avec le clavicomachin, deux minutes, partez pas, on arrive. »
Et là, moi dont la maîtrise de l’espagnol s’est arrêtée en classe de troisième, et qui ne sais prononcer correctement qu’une phrase dans la langue de Cervantès, « Una cerveza por favor », je me sens solidaire de Robert.
Les « dos minutos » annoncées sont en matière élastique et s’allongent considérablement, elles pourraient être représentées par des montres molles à la Dali. Le public s’impatiente, le clavier de Roger reste plongé dans le coma.
Robert Smith réapparaît, une guitare à la main, et commence à chanter, seul, en version acoustique « Three Imaginary Boys », extrait du tout premier album du groupe. Magique ! « Ne m’applaudissez pas trop fort, ça pourrait me donner des idées » dit-il, facétieux avant d’enchaîner avec « Fire in Cairo », une merveille, puis « Boys Don’t Cry » en version lente, un régal.
Enfin, le chanteur dit qu’il pense qu’il devrait continuer avec le reste du groupe maintenant, en précisant « That’s why it’s The Cure, and not Robert Smith », phrase qui devient instantanément culte.
Robert Smith ou l’art et la manière de transformer une situation problématique en moment exceptionnel ! On en aurait presque oublié le clavier en rideau, au fait que devient-il ? Il s’obstine dans son état, résultat : évacuation du bidule. On le remplace, le nouveau fonctionne. Youpi !
C’est avec une bonne cinquantaine de minutes de retard que le concert commence, avec le bien nommé « Open » en ouverture. Et c’est parti pour environ trois heures de show, le problème technique n’aura pas d’incidence sur la durée prévue.
Trois heures éblouissantes, le groupe est dans une forme olympique, comme je m’en étais déjà aperçu à Belfort.
34 chansons, avec pas mal de différences avec la setlist des Eurockéennes dont « Open », « The Caterpillar » irrésistiblement entrainant, « Shake Dog Shake », « Primary », « End », le bijou mélancolique « The Same Deep Water as You » noyé dans des lumières bleues , « Dressing up » où la voix de Robert Smith fait des merveilles, idem pour « Just One Kiss » cultissime face b du single « Let’s Go to Bed » qui est d’ailleurs joué juste après, le jazzy « The Lovecats » et, géographie oblige, l’hispanisant « The Blood ».
Comblé je suis (et à parler comme Yoda je me mets, ça m’arrive dans ces cas là^^). Un set acoustique non prévu qui résulte d’une situation au départ contrariante, un concert longue durée avec une bonne part de titres rarement joués par le groupe et que, pour ma part, je voyais jouer pour la première fois en live.
Avec le show de Belfort, c’est un des meilleurs concerts auxquels j’ai assisté, toutes catégories confondues. Avec le SummerCure, la tournée des festivals qu’il a entreprise, le groupe montre qu’il est au sommet de son art. Généreux, les musiciens jouent simplement pour le plaisir de jouer, alors qu’ils n’ont aucun nouvel album à promouvoir, et ça se voit.
Outre The Cure, j’ai assisté au set de Band of Skulls, garage rock teinté de blues bien efficace, Snow Patrol, pop rock bien sympa avec de bonnes ballades comme « Chasing Cars » ou « Run » manifestement appréciées par la frange féminine des fans du groupe.
Mais mon coup de cœur est pour un groupe espagnol baptisé McEnroe.
Alors que je parcourais le festival, des notes élégantes me sont tombées dans les oreilles. En remontant à leur source, sous un chapiteau, je suis tombé sur McEnroe, pas le joueur de tennis qui aurait fait de l’air guitar avec sa raquette, mais un groupe avec de vrais instruments. Musique assez planante qui sur le coup m’a évoqué Archive. Découverte…